61,8km en 7H48′
Si Serge avance toujours vers le nord, mes pensées étaient ce jour tournées un peu plus à l’ouest vers le Mozambique. Il reste tant à organiser et la zone nord de Beira n’est franchement pas peuplée de Tours operators ou de français expatriés. Le fait de ne de pas se poser et de ne pas avoir de wifi complique la tâche. C’est ma progression personnelle de l’aventure qui m’éloigne aujourd’hui du présent de notre avancée sur la nationale 4. René assure les ravitos et si je suis présente de corps, mon esprit est préoccupé par « l’ailleurs » et la projection de la suite de l’aventure.
Danz qui a un peu forcé hier, avec 15km et une belle descente, a tout de même marché 5 kilomètres ce matin, chapeau! Serge semble programmé malgré la chaleur et le soleil cuisant sans compter les moustiques voraces d’hier soir et de ce matin. Je crois que notre priorité du jour, sera de trouver un coin à l’ombre pour le campement, ce qui veut dire des arbres et non loin, de l’eau ou de l’humidité donc des moustiques. Le choix consiste à préférer l’ombre et les moustiques au soleil ardent et la chaleur écrasante!
Nous redescendons tranquillement de la montagne et la légère brise qui souffle, n’est pas rafraîchissante pour deux sous. Les villages sont plus présents depuis hier, de petits villages avec peu de choses dans les boutiques. Nous ne trouvons plus de pain, les fruits sont rares et la viande inexistante. Ce matin, nous avons trouvé des oeufs, ce soir se sera omelette. Nos réserves de riz ne sont pas prêtes de s’épuiser, nous en avons un stock. Danz a acheté des pommes de terre et des carottes. La profusion de fruits de l’Est n’arrive pas jusqu’ici. Il n’y a en fait pas d’organisation qui permettrait de ravitailler les 4 coins du pays dans ce qu’il manque. Les fruits de l’Est restent à l’Est et parce qu’il y a des camions et des chauffeurs qui s’arrêtent sur le bord de la route pour acheter aux producteurs locaux, les fruits tels que les bananes arrivent jusqu’à Tana. Il s’agit d’un commerce parallèle que les chauffeurs prennent à leur compte et qui n’a rien d’officiel. Nous avons vu des fruits pourrir par terre dans la partie Est et ici il n’y en a pas. La distribution entre les régions n’est pas organisée et n’existe pas! Olivier nous a expliqué que si l’état des routes étaient meilleures, sans doute cela permettrait de mieux faire circuler les marchandises… Danz nous a également expliqué que les malgaches mangent ce qu’il y a là où ils sont. Ils mangent ce que la nature avoisinante leur fournit et ne sont pas spécialement fruits.
Nous avons également retrouvé quelques rizières, petits lopins au creux des vallons. Un fait incroyable, Madagascar ne produit pas assez de riz pour sa population et doit en importer alors que c’est l’aliment de base du pays. Encore une fois, il s’agit de petits exploitants et la culture du riz n’est ni dirigée, ni optimisée, ni organisée. Il ne semble pas y avoir de producteurs à grande échelle. Sauf peut-être pour les litchis, ces fruits qui partent chaque année de Tamatave vers l’Occident entre autre pour garnir nos rayons de fin d’année. Le traitement de ces litchis, azotés afin qu’ils se conservent durant le transport, est une culture organisée, d’autant que les arbres à litchis ne poussent pas de façon naturelle mais sont plantés. Il s’agit là d’un système organisé qui n’est pas géré par les « petites » gens mais plutôt par des investisseurs.
Il existe également une entreprise française « Ecofruit » qui achète des ananas et fruits exotiques pour les expédier en France. Enfin la société Caudal de Madagascar, a vocation à transformer les fruits en compotes, confitures et jus de fruits, elle achète également des fruits à des exploitations organisées.
Sur notre fin d’étape, nous verrons des manguiers et jujubiers qui sont pour l’instant vert de feuilles, ce n’est pas la saison.
Notre campement s’établit à proximité de la borne 280 km de Majunga, nous sommes à mi chemin entre Tananarive et Majunga à 273 m d’altitude – Dieu qu’il fait chaud. Serge est en version pivoine cramoisie, le visage rouge et pour la première fois, le sel apparaît sur ses vêtements. Comment fait il sur le bitume des heures durant?
Au 50ème kilomètre, nous traversons le village de Antanibary qui s’étend sur 2 kilomètres avec des échoppes plus délabrées et insalubres les unes que les autres, il n’y a rien d’agréable à regarder ici. Hassina et Danz nous expliquent qu’il s’agit d’un ville d’orpailleurs, de chercheurs d’or. Dans ce coin, la recherche d’or mécanisée n’est pas autorisée, seule la recherche manuelle est tolérée et du coup, des Malgaches de façon indépendante recherchent le filon. A savoir, les Chinois sont très présents dans ce domaine minier. Durant la période de transition de 2009 à 2014 (suite au Putch qui renversa le président malgache, Marc Ravolomanana), les Chinois ont beaucoup investi l’île, et certains Malgaches parlent de pillage de leur île.
Mais les Malgaches ne sont pas belliqueux et semblent plutôt résignés quant à toutes ces transactions des hautes sphères sous couvert de corruption.
Au final, nous campons sous 2 manguiers et comble de plaisir sans trop de moustiques. En contre bas la rivière Ikopa s’écoule, large cours d’eau qui s’écoule entre de petits vallons. Le paysage a encore changé et nous ne nous lassons pas de découvrir ce pays aux 1000 facettes.